
Olivier Dussopt, ministre du Travail, et Carole Grandjean, ministre déléguée chargée de l'Enseignement et de la formation professionnels, ont présenté, lundi 12 septembre 2022, aux partenaires sociaux, la feuille de route des réformes sociales projetées par l’exécutif. Le programme des concertations à venir s’annonce chargé. Tour d’horizon des sujets qui seront abordés en passant par l’apprentissage, la formation, l’assurance chômage, le partage de la valeur, le compte épargne-temps universel, sans oublier la réforme des retraites.
Mesures pour amplifier le développement de l’apprentissage
Un million d’apprentis d’ici la fin du quinquennat, c’est l’objectif que se fixe le gouvernement, pour aller au-delà du record de 732 000 contrats d’apprentissage enregistré en 2021.
Pour amplifier le développement de l’apprentissage, l’exécutif entend agir sur plusieurs points :
- les aides financières aux entreprises : les aides exceptionnelles à l’apprentissage mises en place dans le cadre de la crise sanitaire doivent s’éteindre à la fin de l’année 2022 ; elles seront ajustées à partir du 1er janvier 2023, afin d’être mieux « calibrées » ;
- les niveaux de prise en charge des contrats d’apprentissage, c’est-à-dire les financements versés aux CFA : ils ont fait l’objet d’une première révision au 1er septembre 2022 (arrêté du 31 août 2022, JO du 1er septembre, texte 26), qui sera suivie d'une seconde révision en avril 2023, afin de réduire les écarts constatés entre les « coûts-contrats » et les coûts réels relevés ;
- la sécurisation du parcours de l’apprenti, notamment en cas de rupture du contrat d’apprentissage, et des passerelles plus faciles avec la voie professionnelle.
Formation : VAE, CPF et transitions professionnelles pour répondre aux besoins en compétences
Le gouvernement souhaite aménager certains dispositifs de formation professionnelle pour répondre aux projets des actifs et aux besoins en compétences des entreprises.
La validation des acquis de l’expérience (VAE) sera ainsi simplifiée et sécurisée, pour la rendre plus attractive et plus accessible. En amont de la concertation qui doit s’ouvrir avec les partenaires sociaux, le projet de loi « Marché du travail », présenté en Conseil des ministres le 7 septembre, prévoit déjà certaines mesures en ce sens (voir notre actu du 08/09/2022, « Assurance chômage et VAE : le projet de loi « Marché du travail » en prélude à une réforme plus vaste »).
Le compte personnel de formation (CPF) devrait être aménagé afin d’être « mieux orienté sur les besoins de l’économie ».
Le gouvernement souhaite également « repenser les dispositifs d’accompagnement et de soutien aux transitions professionnelles ».
L'amélioration du partage de la valeur et le CET universel au service d’un « travailler mieux »
Ces deux sujets, qui avaient quelque peu disparu des communications officielles récentes, ne sont pas oubliés.
Ils sont intégrés à un vaste chantier portant sur le « travailler mieux », qui abordera également l’amélioration des conditions de travail et l’attractivité des métiers, la prévention de l’usure professionnelle, le renforcement de la lutte contre les accidents du travail et la « juste » rémunération.
Sur l'« amélioration du partage de la valeur », on rappellera que le programme présidentiel faisait mention d’un « dividende salarié », avec l’idée qu’une entreprise ne pourrait verser de dividendes à ses actionnaires que si elle reverse une partie de ses profits à ses salariés. Pour l’heure, cette expression n’est pas reprise à la lettre. Davantage de précisions devraient être apportées lors des premières discussions avec les partenaires sociaux sur le dispositif envisagé, qui devraient s’engager à l’automne 2022.
Réforme des retraites : un retour au pas de charge
Elle n’est pas oubliée non plus, la réforme des retraites fera l’objet d’une concertation avec les partenaires sociaux qui doit s’ouvrir après la présentation du rapport annuel du Conseil d’orientation des retraites le 15 septembre 2022. Et comme l’avait annoncé Emmanuel Macron, elle reposerait sur un grand principe : il faudra travailler plus, tout en prenant en compte les situations individuelles, et en particulier les carrières longues et difficiles.
Reste à voir à quelle borne l’âge légal de départ à la retraite serait repoussé et selon quel calendrier. La concertation s’annonce houleuse avec les syndicats, qui y sont en grande majorité hostiles.
Sur l’hypothèse d’une mesure d’âge qui serait introduite dans le prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), le cabinet du ministère du Travail s’est refusé à tout commentaire. Dans tous les cas, le chef de l’État entend faire adopter cette réforme rapidement, afin qu’elle entre en vigueur dès l’été 2023 (Le Monde, « Emmanuel Macron veut relancer sa réforme des retraites », 13/09/2022).
Les discussions sur la réforme des retraites porteront également sur les carrières longues, la prévention de l’usure professionnelle, la pénibilité, le maintien en emploi des seniors, ainsi que les dispositifs de transition entre l’activité et la retraite.
Vers une assurance chômage qui s’adapte à la conjoncture
Rendre l’accès à l’assurance chômage plus strict quand la situation de l’emploi est bonne et, à l’inverse, en faciliter l’accès quand la situation de l’emploi est moins bonne.
Selon un système de « contracyclicité », les règles d’indemnisation du chômage seraient ainsi modulées en fonction de la conjoncture économique et de la situation du marché du travail.
À l’issue de la concertation avec les partenaires sociaux, ce mécanisme sera mis en place par décret.
Rappelons que le régime actuel d’assurance chômage, issu d’un décret du 26 juillet 2019, arrive à expiration le 1er novembre 2022. Le projet de loi « Marché du travail » autorise le gouvernement à prendre un décret pour le proroger jusqu’au 31 décembre 2023 au plus tard (voir notre actu précitée).
Mais cette prorogation ne devrait donc pas se faire strictement à l’identique, puisqu’elle intégrerait ce nouveau mécanisme de « contracyclicité ».
Mesures en faveur de l’insertion professionnelle
Création de France Travail. – La rénovation du service public de l’emploi s’effectuera par la création de France Travail, qui doit remplacer Pôle Emploi et rassembler l’ensemble des acteurs de l’emploi. Une mission de concertation et de préfiguration a été confiée à Thibaut Guilluy, haut-commissaire à l'Emploi et à l'Engagement des entreprises, en vue d’élaborer d’ici la mi-décembre la feuille de route de cette transformation.
Accompagnement des allocataires du RSA. – Le gouvernement entend mener la réforme de l’accompagnement des allocataires du RSA, avec la mise en place d’un « engagement réciproque » et ayant comme priorité l’accompagnement d’un projet professionnel hebdomadaire, personnalisé et intensif.
Insertion des jeunes. - Le déploiement du contrat d’engagement jeune (CEJ) sera poursuivi et des actions d’accompagnement spécifiques pour les jeunes en rupture seront déployées dans les territoires.